Un aperçu de l’officine algérienne de 1962 à nos jours…

Par : Dr Ahmed Benfares : Président de la section pharmacie d’officine de la Fédération Algérienne de Pharmacie.
L’Officine Algérienne a une histoire qui mérite d’être connue afin de pouvoir apprécier la longue et laborieuse trajectoire de son évolution avant d’être ce qu’elle est aujourd’hui. Ce serait un travail fort intéressant qui pourrait faire l’objet d’une étude suivie d’une publication. Par cette contribution, je n’ai pas la prétention de faire cette histoire mais juste rendre un hommage à l’officine Algérienne à la veille du 5 juillet, date anniversaire de notre indépendance et point de départ de tout le système de santé Algérien.
Au lendemain de l’indépendance, l’Algérie s’est retrouvée face à de nombreux défis. La transition devait se faire sans qu’il y ait interruption des services dans la vie des Algériens. Parmi ces défis à relever, il y avait l’organisation du système de santé avec les moyens existants, la pharmacie de ville faisant partie du système de santé, allait être elle aussi l’objet de l’intérêt des pouvoir publics.

Dans cette conjoncture où l’offre en structures et en ressources humaines est très insuffisante, l’Algérie a fait le choix de prioriser la médecine préventive et d’organiser un système de santé en mesure d’offrir un minimum de soin à la population.
Les inégalités sociales induites par le système colonial ont fait que les pharmacies existantes, comme la plupart des structures de santé, étaient concentrées dans les grandes villes et le littoral, le reste du pays était complètement démuni. Les pharmaciens de l’époque étaient dans la quasi-totalité d’origine Européenne, ils ont presque tous quitté le pays à l’indépendance.
Certaines sources avancent qu’il n’y avait que 70 pharmaciens Algériens à l’indépendance et une vingtaine d’autres d’origine Européenne.
Ne disposant pas d’assez de pharmaciens pour reprendre les pharmacies abandonnées et pour doter les autres zones où il n’y en avait pas, l’Etat a eu recours aux agences PCA (Pharmacie Centrale Algérienne) qui sont devenues par la suite ENDIMED (Entreprise Nationale de Distribution des Médicaments au Détail), dans lesquelles activaient de simples agents dont certains s’étaient formés dans les pharmacies des Européens.
Leur rôle devait se limiter à la délivrance de médicaments aux citoyens sans, bien entendu, la valeur ajoutée de la dispensation par le pharmacien.
Si, le recours aux agences a été indispensable dans un premier temps, il a été néanmoins préjudiciable à la fonction du pharmacien dans l’esprit général, puisque le rôle de délivrance a pu être assuré par de simples agents. Le préjudice à la fonction est aussi dans le fait qu’avec le temps, ces agents se sont attribués des prérogatives qui ne leur appartiennent pas dans le conseil et la médication.
La profession de pharmacien a connu alors une certaine banalisation qui s’est perpétuée jusqu’à nos jours. Il n’est pas évident de rétablir la situation si notre système de santé ne passe pas le cap en révolutionnant les missions de la pharmacie de ville.
Ces agences qui ont permis de donner une solution à la difficulté du moment sont l’objet de contestations de la part des pharmaciens et de leurs organisations professionnelles. En effet, elles n’ont plus de raison d’être puisque le problème de la couverture par des pharmaciens universitaires est actuellement plus qu’assurée par pas moins de 12500 officines à travers le territoire national.
Les agences sont, selon certaines sources, au nombre de huit cent à travers le territoire national.
Découvrir l’itinéraire de la pharmacie d’officine est important dans la mesure où les évolutions de cette dernière reflètent la disponibilité du médicament pour les citoyens et la manière dont ce médicament est délivré. En effet, les différentes politiques de santé publique, les politiques de formation universitaire, ainsi que les fluctuations de l’économie nationale, ont impacté l’évolution de l’officine que ce soit, sur le nombre de ces pharmacies, que sur la qualité des prestations en matière de disponibilité des médicaments.
Un des défis de l’Algérie indépendante a été donc la formation universitaire pour combler le vide existant en matière de cadres nationaux.
L’université Algérienne a commencé à former des pharmaciens de haut niveau, quelques dizaines au début des années 1960, puis une centaine au début des années 1970 pour dépasser le millier par an ces dernières années.
Si les premières promotions n’ont pas eu trop de difficulté à s’installer et couvrir partiellement les besoins, il n’en a pas été ainsi pour les suivantes.
Même si la couverture nationale n’était pas assurée en pharmaciens d’officine, il n’était pas évident de pouvoir s’installer en privé dans les années 70 et début 80.
Le système politique socialiste de l’époque n’était pas en faveur du secteur privé et ce n’était que quelques rares privilégies comme les enfants de chouhadas qui accédaient systématiquement à l’officine. Pour les autres les postes étaient ouverts avec parcimonie.
à suivre …..