Dr TERKMANE : Nous ne pouvons accepter que les professions médicales soient pratiquées comme un commerce !
Dans cet entretien, le Dr Yacine Terkmane président du conseil régional de l’ordre des médecins de Blida, revient sur la vente des médicaments via internet en Algérie.
Question 1 -Des personnes se présentant comme des pharmaciens d’officine, font la publicité des compléments alimentaires et plus graves encore des médicaments. Quelle est votre réaction en tant que Président du Conseil Régional de l’Ordre des Médecins de Blida ?
Dr Terkmane Yacine : En tant que président du Conseil Régional de l’Ordre des médecins, préoccupé par les aspects éthique et déontologiques communs aux professions médicales, nous ne pouvons accepter et tolérer que les professions médicales soient pratiquées comme un commerce. Le produit pharmaceutique, tout particulièrement le médicament, et les compléments alimentaires ne sont pas des biens marchands ni des denrées éligibles aux règles du marché. La publicité sur ces produits mettrait en cause la respectabilité de la pharmacie d’officine qui la pratiquerait.
Q2/ Il y a des textes de loi qui interdisent toute publicité sur les produits pharmaceutiques et qui encadrent fortement la publicité sur les compléments alimentaires. Quelles sont les sanctions prévues par la loi et qui doit se saisir de ce dossier pour mettre fin à ces pratiques ?
Dr Terkmane Yacine : Sur le plan législatif et règlementaire, bien que les produits pharmaceutiques et les compléments alimentaires soient vendus dans les pharmacies il faut d’emblée faire le distinguo entre les deux cars ils relèvent de deux ministères et de législations et règlementations différentes, les premiers relèvent du ministère de la santé, les seconds du ministère du commerce.
1 – Pour ce qui est des produits pharmaceutiques, médicaments essentiellement:
L’article 237, alinéa 5 de la loi 18/11 du 2 juillet 2018 relative à la santé stipule expressément que ‘’ La publicité pour les produits pharmaceutiques et la promotion en direction du public sont interdits quel que soit les moyens d’information utilisés’’. Donc ipso facto la publicité sur les produits pharmaceutiques est illégale. L’article 427 de la loi relative à la santé a prévu une amende de 200 000 à 500 000 DA pour quiconque contrevient aux dispositions des articles 237 et 238 relatifs à l’information et la publicité sur les produits pharmaceutiques. Les pouvoirs publics et éventuellement l’Ordre des pharmaciens s’il s’agit de la mise en cause d’une pharmacie d’officine, sont habilités à mettre fin à ces pratiques.
2 – Pour ce qui est des compléments alimentaires:
Les compléments alimentaires sont des denrées alimentaires et non des médicaments et ne peuvent remplacer en aucun cas une alimentation normale. Les principes éthiques et déontologiques des professions médicales devraient en interdire la publicité en direction du public. La publicité peut entrainer une automédication et une surconsommation pouvant dépasser les apports journaliers recommandés et la limité supérieure de sécurité et entrainer des risques sur la santé, de toxicité et/ou d’interaction médicamenteuses. Le rôle du pharmacien d’officine est important. Il doit intervenir non dans la publicité mais dans le conseil pour les patients pour une consommation éclairée des compléments alimentaires qui sont et doivent rester des produits de confort.
Sur le plan règlementaire, après le boom des compléments alimentaires pendant le Covid 19 et les publicités et les allégations mensongères des compléments alimentaires sur les chaines de télévisions Mr Ali Aoun alors ministres des industries pharmaceutiques avait pris la décision salutaire d’interdire en octobre 2022 toute publicité sur les compléments alimentaires.
Q3 / Avec le développement des TIC et la généralisation des TIC, quelle sont d’après vous les mesures d’anticipation qu’il faudrait prendre pour protéger la santé des citoyens ?
Dr Terkmane Yacine : Avec le développement des TIC et tout particulièrement les réseaux sociaux, afin de protéger la santé des citoyens, il faudrait élargir aux compléments alimentaires l’interdiction de toute publicité en direction du public quel que soit les moyens.